Coup de tonnerre au sommet du PDCI-RDA. Dans une lettre rendue publique ce dimanche 11 mai 2025, Tidjane Thiam a annoncé sa décision de remettre son mandat de président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire. Il a, dans la foulée, été nommé Président Délégué du parti, tandis que le doyen des vice-présidents, Ernest N’Koumo Mobio, prend les rênes en tant que président par intérim.
« C’est dans l’intérêt supérieur de notre Parti que je prends la décision de remettre entre vos mains, à compter de ce jour, mon mandat de Président », a expliqué l’ex-banquier international, élu à la tête du vieux parti le 23 décembre 2023 avec plus de 96 % des voix, dans une lettre adressée aux militants.
Tidjane Thiam dénonce un « harcèlement judiciaire inqualifiable », une instrumentalisation de la justice et « un déni de nationalité », accusant ses adversaires d’avoir orchestré une campagne visant à fragiliser son leadership et à affaiblir le parti.
Un climat juridique tendu
Depuis son élection, l’ancien patron du Crédit Suisse affirme avoir œuvré, avec le soutien de la base militante, à une « importante modernisation et remobilisation » de la formation houphouëtiste. « Cela a suscité chez nos compatriotes un engouement réel », écrit-il, rappelant son investiture comme candidat à la présidentielle lors du Bureau politique du 16 avril dernier.
Mais cette dynamique semble avoir déclenché une riposte musclée du pouvoir. Selon Thiam, les attaques dont il fait l’objet visent à freiner l’élan du PDCI-RDA. « Ces avancées annonciatrices de notre prochain retour au pouvoir d’État ont déclenché des attaques répétées et injustifiées, avec la justice pour principal instrument », écrit-il.
Cette décision ne change rien à l’engagement que j’ai pris…
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Tidjane Thiam
Sa décision de se retirer de la présidence du parti intervient dans un climat juridique tendu. Le 22 avril dernier, le juge électoral du tribunal d’Abidjan a ordonné sa radiation de la liste électorale, estimant qu’il avait perdu la nationalité ivoirienne du fait de sa naturalisation française en 1987. Cette décision irrévocable fait suite à une requête déposée dans le cadre du contentieux lié à la révision de la liste électorale provisoire.
Jeudi 8 mai, la justice ivoirienne a repris l’examen d’une assignation portée contre Tidjane Thiam par Valérie Yapo, militante exclue du PDCI. Cette dernière conteste non seulement la légalité de son exclusion, mais aussi la légitimité de Thiam à diriger le parti.
« Une prise en otage planifiée »
Selon Mme Yapo, les organes qui ont décidé de son exclusion n’étaient pas habilités à le faire car ils auraient été mis en place par un président « illégitime ». Pour appuyer sa requête, elle s’appuie notamment sur l’article 48 du Code de la nationalité ivoirienne, estimant que Tidjane Thiam n’était plus Ivoirien, mais uniquement Français, au moment de son élection à la tête du parti.
Les avocats du PDCI, qui accusent Mme Yapo de vouloir mettre le parti sous tutelle, ont demandé l’ouverture de nouveaux débats en apportant des éléments supplémentaires au dossier. Le procès, loin d’être clos, devrait entrer dans une nouvelle phase le jeudi 15 mai, avec la tenue de plaidoiries publiques.
Dans sa lettre, Thiam ne fait pas directement mention de cette affaire, mais évoque « une prise en otage planifiée » dont il entend « préserver le Parti ».
Cependant, le retrait de Thiam de la présidence du parti ne signifie pas pour autant la fin de l’engagement politique de Thiam. « Cette décision ne change rien à l’engagement que j’ai pris de conduire personnellement notre Parti à la victoire en octobre 2025 et je le ferai », assure-t-il.
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Ernest N’Koumo Mobio à la rescousse
Dans la foulée, le PDCI-RDA a officialisé la nomination d’un président par intérim. Conformément aux statuts du parti, c’est le doyen des vice-présidents, Ernest N’Koumo Mobio, qui prend la tête de l’organisation. « Je ne puis me dérober à l’appel du devoir », a affirmé dans une déclaration solennelle diffusée, l’ancien vice-président de l’Assemblée nationale (1981-1985) et premier maire de la ville d’Abidjan.
Dans une décision quelques minutes après, le nouveau président par intérim a immédiatement nommé Tidjane Thiam Président Délégué du PDCI-RDA, un poste créé pour permettre à ce dernier de continuer à jouer un rôle central dans la gestion du parti. Une façon de contourner les risques juridiques liés à la procédure engagée par Valérie Yapo contre sa légitimité statutaire ?
« Le Président Délégué du PDCI-RDA a pour rôle d’assister le Président par intérim du Parti dans tous les aspects de la gestion et de la direction du Parti », précise l’article 2 du document officiel. Un poste qui prendra fin dès l’élection d’un nouveau président.
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Face à l’urgence de la situation, le Bureau Politique a été convoqué en session extraordinaire le lundi 12 mai à 11h à la Maison du Parti à Cocody, annonce un communiqué du président par intérim. Élargie au Comité des Sages, cette 19ᵉ réunion s’annonce décisive : c’est l’avenir du PDCI-RDA, le plus ancien des partis politiques ivoiriens, qui est en jeu.
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