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Côte d’Ivoire : Guillaume Soro, ennemi d’État des temps modernes, le héros d’hier victime de persécution de tous genres

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S’il a été un court moment porté en triomphe, pour avoir contribué à rendre éligible le président du Rassemblement des républicains et à se battre pour sauvegarder la victoire d’Alassane Ouattara à la présidentielle de 2010, Guillaume Soro, tombé en disgrâce auprès du chef de l’Etat ivoirien, est désormais voué aux gémonies par le pouvoir.

Contre le climat de méfiance qu’il récoltait en retour, Guillaume Soro aura professé sa bonne foi, jusqu’au bout. En vain.

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Alors que le climat politico-social, de 2000 à 2002 était tout aussi tendu qu’en 1999, l’ancien secrétaire général de la Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (Fesci) et une poignée de jeunes ivoiriens, civils et militaires, décident de prendre leurs responsabilités, pour tenter de crever l’abcès, dans l’espoir de ramener le calme dans le pays. Leur stratégie est pour le moins audacieuse : casser le thermomètre, pour faire baisser la fièvre.

Le 19 septembre 2002, ils déclenchent donc un mouvement visant à déposer le président Laurent Gbagbo. L’option du putsch ne marche pas et laisse finalement place à une rébellion armée qui consacre la partition du pays en deux, les militaires qui ont lancé l’assaut ayant décidé de replier vers les zones nord du pays, plus favorables.

Leur principal quartier général, c’est la ville de Bouaké. Si leurs revendications portent essentiellement sur une plus grande dignité pour les populations issues des régions nord du pays, notamment la fin du délit de faciès, l’inclusion dans le jeu politique, on comprend très vite que les insurgés réclament surtout la réhabilitation de l’ancien Premier ministre de Félix Houphouet-Boigny.

Alassane Ouattara, alors président du Rassemblement des républicains (RDR), avait en effet maille à partir avec les différents régimes qui se sont succédés à la tête du pays après le décès du premier président ivoirien.

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Accusé de nationalité douteuse, l’ancien gouverneur de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Bceao) a été empêché par plusieurs artifices politico-judiciaires de se présenter à différentes élections présidentielles en Côte d’Ivoire.

Traqué, il a été contraint de prendre le chemin de l’exil, avant de revenir à la faveur du coup d’Etat qui a emporté Henri Konan Bédié, en décembre 1999, sans que grand-chose ne change dans son sort.

C’est finalement, au terme de plusieurs pourparlers visant à mettre fin à la rébellion du 19 septembre 2002, que le président du RDR obtiendra le droit de se présenter à l’élection présidentielle mainte fois reportée, qui se tient finalement en octobre 2010.

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UNE LUTTE POUR LA CANDIDATURE DE OUATTARA

A Prétoria, en Afrique du Sud (dont le président d’alors, Thabo MBeki, était médiateur dans la crise ivoirienne) en avril 2005, une parade fut trouvée pour contourner l’article 35 de la Constitution de 2000, qui constituait un verrou, empêchant l’ex-directeur général du Fonds monétaire international (FMI) de pouvoir candidater à des élections en Côte d’Ivoire.

Ironie du sort, c’est le jeune Guillaume Soro, alors secrétaire général des mouvement rebelles, baptisés Forces nouvelles, devenu Premier ministre à l’issu des Accords politique de Ouagadougou de 2007, qui a la lourde charge d’organiser cette élection dite de sortie de crise.

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Si tout se passe bien dans l’organisation du premier tour de l’élection, le camp du président sortant, Laurent Gbagbo se braque lors du second tour, invoquant des fraudes massives lors du vote, dans la partie septentrionale du pays, acquise à la cause de son challenger, Alassane Ouattara.

Et, après que la Commission électorale indépendante (CEI) a proclamé celui-ci vainqueur du second tour, le président sortant et ses partisans ont refusé de reconnaître les résultats, allant jusqu’à bloquer le processus de validation desdits résultats. Guillaume Soro, alors chef du gouvernement et maître d’œuvre du processus électoral, tente alors de raisonner le chef de l’Etat. En vain.

S’engage alors un bras de fer entre le vainqueur et le vaincu, arbitré par la communauté internationale, qui ne reconnaît qu’Alassane Ouattara comme nouvel homme fort du pays. Le président du RDR, reclus au Golf hôtel, alors considéré comme l’un des quartiers généraux des Forces nouvelles, est contraint de composer avec celui qui était jusqu’alors le Premier ministre de Laurent Gbagbo.

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L’EPISODE DE LA CRISE POSTELECTORALE DE 2020-2011

Il fait donc de Guillaume Soro, l’ancien secrétaire général des Forces nouvelles, son premier chef de gouvernement, qu’il charge de pacifier le pays, pour lui permettre de prendre fonction sereinement. Au bout de cinq mois de violents affrontements, la crise qui fait plus de 3000 morts selon le bilan officiel, se solde par la reddition de Laurent Gbagbo.

Il est obligé de capituler face à la supériorité des forces en face de lui. Guillaume Soro, porté en triomphe, est affublé de tous les qualificatifs élogieux de la part du RDR qui, pourtant, au départ, ne lui faisait pas totalement confiance. Une fois au pouvoir, Alassane Ouattara décide de s’allier politiquement aux Forces nouvelles dont certains des cadres sont issus du RDR.

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Grâce à ce deal, le Premier ministre Soro, qui détient jusqu’à présent le record de longévité à la Primature, est élu en 2012 président de l’Assemblée nationale. En juillet 2013, sur les terres de son ‘’sauveur’’, Alassane Ouattara rend un vibrant hommage à son ancien Premier ministre.

« Je voudrais rendre hommage à Guillaume Soro pour le combat qu’il a mené, pour son courage et sa fidélité. Quand nous étions enfermés au Golf, Guillaume Soro a fait une déclaration émouvante pour dire : au nom de ma foi chrétienne, je dis que c’est Alassane qui a gagné les élections. Guillaume Soro s’est battu pour que les populations du nord puissent recouvrer leur dignité par la nationalité ivoirienne », a salué le chef de l’Etat.

« S’il (Guillaume Soro, ndlr) a fait cela, c’est parce qu’il aime la Côte d’Ivoire », a insisté Alassane Ouattara. Pourtant, quelques mois après cet hommage si appuyé, une chape de plomb va recouvrir les relations entre les deux personnalités. Guillaume Soro qui vient d’entamer des tournées dans le pays, pour demander pardon aux Ivoiriens, pour les torts que la rébellion leur a causés, doit mettre fin à son initiative.

LE TEMPS DES SUSPICIONS ET DES COMPLOTS

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L’ancien DGA qui voit dans cette démarche une volonté du président de l’Assemblée nationale de le supplanter, n’apprécie pas trop. En réalité, ce sont plutôt des proches du chef de l’Etat qui l’ont convaincu de recadrer au plus vite son ancien chef de gouvernement, qui aurait l’intention de lui ravir son maroquin.

Ces proches de M. Ouattara, héritiers politiques et candidats à la succession de leur mentor, venait ainsi d’abattre une énième carte, dans le but de neutraliser l’ancien leader estudiantin. Guillaume Soro décide alors de se concentrer sur l’institution dont il est le président et de se réserver sur la scène politique.

Mais, à la faveur de la révision constitutionnelle de 2010, intervenue après une réélection aux forceps du président du RDR à la tête du pays, le député de Ferké est appelé à faire campagne pour la nouvelle Constitution promue par M. Ouattara. Contre mauvaise fortune, il fait bon cœur. L’idylle ne durera que le temps d’un feu de paille.

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A la faveur de plusieurs mouvements d’humeur de soldats ivoiriens, réclamant du pouvoir qu’il honore plusieurs promesses à eux faites, le camp Ouattara pointe le doigt accusateur en direction du chef du Parlement, accusé de manipuler les militaires dont une grande partie serait d’ancien combattants des ex-Forces nouvelles.

Souleymane Koné Kamaraté dit Soul To Soul, un très proche du président de l’Assemblée nationale est mis aux arrêts en 2017, après une mutinerie qui a fait vaciller le pouvoir. La crise de confiance a atteint son paroxysme.

En début 2019, alors que le chef de l’Etat esquisse tous les plans visant à garder le pouvoir pour son camp, Guillaume Soro, poussé à bout, refuse d’adhérer à son projet de transformation de la coalition qui l’a fait triompher à la présidentielle de 2010 en parti unifié. En représailles, il est contraint à la démission de la présidence de l’Assemblée nationale.

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Dans la perspective de la présidentielle de 2020, il envisage une alliance avec le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI-RDA) d’Henri Konan Bédié, qui a, lui aussi rompu avec M. Ouattara. Et, à l’occasion d’une longue tournée européenne, l’ancien Premier ministre annonce sa candidature à la présidentielle d’octobre 2020, provoquant ainsi une grosse colère de son ancien allié.

Alors qu’il s’apprête à regagner le pays en décembre 2019, l’ancien président de l’Assemblée nationale s’entend dire qu’il doit retarder son voyage. Après un premier report de quelques jours, il embarque à bord d’un jet privé, direction : Abidjan. Le comité d’accueil prévu par le pouvoir ivoirien oblige Guillaume Soro à un aller-retour.

Depuis lors, celui qui a fondé en juillet 2019 Générations et peuples solidaires (GPS), est donc contraint à l’exil. Sale temps pour les ‘’héros de la démocratie’’. Plusieurs partisans de Guillaume Soro sont arrêtés à Abidjan. Ceux qui acceptent de lâcher leur ‘’patron’’ d’hier pour cause de haute trahison à l’égard du grand chef, sont blanchis de toutes accusations.

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Ceux qui veulent jouer les résistants avec l’ancien secrétaire général des ex-Forces nouvelles, sont accusés, tout comme lui, d’atteinte à l’autorité de l’Etat.

Ce chef d’accusation vaut d’ailleurs à Guillaume Soro une condamnation à la prison à vie, tel qu’annoncé par Alassane Ouattara himself. La résidence de Premier ministre offerte par l’Etat de Côte d’Ivoire à Guillaume Soro par Laurent Gbagbo, est saisie. Les effets personnels de son propriétaire d’un temps, vendus aux enchères. Ainsi va la vie des héros de la démocratie sous certaines latitudes.

Générations Nouvelles

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