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L’atmosphère était lourde à Djorobité 2 ce mercredi 26 février 2025. Ce qui devait être une simple marche de protestation contre le chef du village s’est transformé en scènes de violence inédites, sous les yeux des journalistes présents pour couvrir l’événement.
Dès notre arrivée aux environs de 10 heures, nous avons constaté un groupe de jeunes manifestants, pancartes en main, scandant des slogans pour exprimer leur mécontentement. « La jeunesse ne veut plus de Minkan Assi » ; « Les propriétaires terriens ne veulent plus du chef Minkan Assi » ; « Djorobité 2, Minkan Assi, libère notre village », pouvait-on lire.
Aucun d’entre eux n’était armé, leur présence se voulait pacifique. Face à eux, les partisans du chef du village se tenaient fermement devant la chefferie, bloquant l’entrée du palais. Le face-à-face était tendu, mais aucune altercation n’avait encore éclaté.
Tout a basculé lorsqu’une partie des partisans du chef a sorti de longues barres de fer et des morceaux de bois, menaçant les protestataires.
affrontements à Djorobité 2Des partisans du chef tenaient de longues barres de fer et des morceaux de bois. Ph:linfodrome
Des cris, des bousculades, puis une vague de violence s’est abattue sur les manifestants. Nous avons vu, de nos propres yeux, ces partisans frapper les protestataires. L’un d’eux a été atteint à la tête par une brique lancée avec force. Il s’est effondré au sol, inconscient, alors que la bagarre s’intensifiait.
Les journalistes pris pour cibles
Quelques minutes plus tard, la police est intervenue pour calmer la situation. Parmi les personnes présentes, un pasteur ayant acheté un terrain pour son église, mais en conflit foncier, a été désigné par les partisans du chef et interpellé. Il ne semblait pourtant impliqué dans aucun acte de violence.
Dans un souci d’équilibre de l’information, les journalistes ont tenté d’obtenir la version des faits des partisans du chef. Mais loin de vouloir s’exprimer, certains d’entre eux se sont retournés contre les hommes de médias. Deux d’entre eux, identifiés comme proches du chef Minkan, ont accusé les journalistes d’être les instigateurs de la manifestation.
Les menaces ont fusé : « Si vous continuez, vous allez voir ! ». L’un d’eux a même crié que les journalistes étaient des braqueurs, tentant d’alerter la foule pour les faire lyncher. Face au danger imminent, nous avons préféré quitter les lieux.
Le jeune homme atteint à la tête par une brique.
On dénombre quatre blessés dont un cas grave. Une source proche du dossier nous a apporté un éclairage sur les motivations profondes de cette protestation.
« À l’origine, c’était une marche pacifique contre le bradage de leurs terres. Mais la situation foncière à Djorobité est explosive. Beaucoup accusent le chef du village d’être le principal responsable de la vente illicite des terres. Une vingtaine de personnes, dont un pasteur qui avait acheté un terrain pour son église, se sont fait exproprier sans recours. Ces injustices attisent la colère. »
Une crise foncière qui prend de l’ampleur
Ce qui s’est passé à Djorobité 2 est symptomatique des tensions croissantes liées aux litiges fonciers dans plusieurs localités ivoiriennes. Depuis quelques semaines, la gestion du foncier est au cœur de vives polémiques, notamment à Djorobité 2 où de nombreux cas de spoliation sont dénoncés par les habitants.
L’affaire a pris une ampleur nationale après la diffusion, le 8 février 2025, d’une vidéo de Dame Traoré affirmant avoir été victime d’une spoliation foncière. Ses accusations ont fait écho à celles d’autres victimes, dont l’imam Cissé et M. N’Goran Léon, qui pointent du doigt des procédures administratives opaques facilitant l’expropriation de nombreux citoyens.
Le chef du village de Djorobité 2, Nanan Minkan Assi Joseph (chapeau noir)Le chef du village de Djorobité 2, Nanan Minkan Assi Joseph (chapeau noir)
Le nom de Komé Bakary revient régulièrement dans ce dossier. Accusé d’user de stratagèmes pour s’approprier des terrains à l’aide d’Arrêtés de Concession Définitive (ACD) frauduleux, il est au cœur des tensions actuelles.
Pourtant, dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux le 13 février 2025, le chef du village de Djorobité 2, Nanan Minkan Assi Joseph, a nié en bloc toute implication dans ces ventes controversées. Il affirme n’avoir jamais délivré d’attestation villageoise à Komé Bakary, notamment sur le lot 1294, îlot 135, objet d’un conflit particulier.
Cette crise révèle les failles de la gestion foncière en Côte d’Ivoire, où la spoliation des terres et les conflits entre autochtones et acquéreurs sont monnaie courante. Le gouvernement de son côté assure que l’instauration de l’attestation de droit d’usage coutumier (ADU) vise justement à prévenir l’escalade de telles violences et restaurer la confiance dans les mécanismes de gestion foncière.
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