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Le 26 septembre sur la chaîne d’information en continu France 24, monsieur Robert Bourgi, qui s’est lui-même présenté comme l’homme de confiance des présidents Chirac et Sarkozy dans leurs relations avec les présidents d’Afrique francophone, s’ est livré à certaines déclarations que certains ont très vite interprétées comme des informations de « première main », qui lèvent un coin de voile sur la « françafrique » et aussi sur la crise post-électorale de 2010-2011 en Côte d’Ivoire.
Tout d’abord ne perdons pas de vue que Monsieur Bourgi vient de publier ses mémoires, dont il fait en ce moment la promotion sur les médias français. La chaîne France 24 n’est pas le seul média sur lequel il est intervenu depuis la sortie de son livre, il est en tournée médiatique pour son bouquin. Quant au contenu de cette interview de seulement 12 minutes, ce sont des déclarations d’un homme qui certes a vécu certaines choses de l’intérieur, mais des déclarations qui n’engagent que lui. Faut-il absolument prendre cela pour de l’argent comptant ?
Le financement des partis politiques français par les gouvernements africains est connu de tous. C’était une vieille pratique dans les relations entre hommes politiques, c’était le mode de fonctionnement des choses à une certaine époque, c’était du « donnant-donnant ». Comme monsieur Bourgi l’a si bien mentionné, le président Gbagbo n’a pas cherché à remettre en cause le système. Il ya adhéré en versant « 03 millions de dollars » au Président Chirac pour sa campagne de 2002, « parce qu’il voulait s’attirer les faveurs de la France », selon ses dires. Donc le président Gbagbo fut aussi « acteur » de ce système.
D’autre part, Robert Bourgi concentre son accusation sur le président Chirac. Il aurait fallu le faire du vivant de l’homme. Ce n’est pas très convenable d’accuser quelqu’un qui n’est plus de ce monde. Il y a une forme de lâcheté à accuser quelqu’un qui n’est plus là pour se défendre. Il n’est pas exclusif que la veuve du Président Chirac, ou sa fille, porte plainte contre lui. Monsieur Bourgi dédouane totalement le président Sarkozy, et l’ex-premier ministre Dominique de Villepin de ces pratiques. On remarquera qu’ils sont bien en vie ces messieurs, donc en mesure de réagir immédiatement si Monsieur Robert Bourgi les met en cause.
Monsieur Bourgi prétend que le Président Sarkozy a dit ne plus vouloir de l’argent des présidents africains. Pourtant on peut rappeler qu’il a été condamné dans le cadre du financement libyen de sa campagne de 2007. Autrement dit, il refusait l’argent des présidents francophones, mais acceptait celui du colonel Kadhafi. Cette pratique a bel et bien continué sous son règne contrairement aux dires de M. Bourgi, seulement avec d’autres acteurs. M. Bourgi ne veut porter aucune accusation de ce type contre le Président Sarkozy par crainte de ce dernier. Encore une fois, il y a de la lâcheté dans sa démarche.
Monsieur Bourgi prétend avoir reçu « 1 million de dollars par an d’Ali Bongo entre 2009 et 2013 », sans en préciser les raisons. Ali Bongo a donné cet argent certainement en rémunération de quelque chose. Monsieur Bourgi dit vouloir « laver sa conscience », mais ne va pas au bout des révélations, certainement du fait qu’elles sont trop incriminantes pour lui.
Généralement les gouvernements des pays en développement ont recours à des cabinets de lobbying s’ils veulent s’attirer les faveurs des nations occidentales. Cela reste valable jusqu’à aujourd’hui. Ce n’est pas propre aux relations entre la France et ses anciennes colonies. Que ce soit hier du temps des royaumes, ou aujourd’hui avec les Etats, on s’attire les bonnes grâces du roi ou du président en l’intéressant par des présents. Aujourd’hui cela a certainement pris une autre forme, mais le principe reste le même. Les hommes ont toujours fonctionné ainsi.
Le Président Gbagbo avait « gagné » les élections
Concernant la crise post-électorale, on ne va pas refaire l’histoire. Pour Monsieur Bourgi, la Cour Constitutionnelle avait proclamé Laurent Gbagbo vainqueur, donc il fallait s’en tenir à cela. « Nous savions tous que le président Gbagbo avait gagné les élections » a-t-il affirmé. Mais il oublie que la CEI avait proclamé son challenger vainqueur sur la base de la compilation des procès-verbaux du vote bien avant.
La déclaration du Conseil Constitutionnel aurait dû intervenir deux semaines après la proclamation des résultats provisoires, en analysant les requêtes des deux candidats, et sur la base des documents transmis par la CEI. Cela n’a pas été le cas. Le Conseil Constitutionnel a proclamé le « vainqueur » dix minutes après que la CEI ait proclamé les résultats. Il y avait aussi un troisième acteur, qui devait certifier les résultats, c’est la mission des nations unies en Côte d’Ivoire. Ce sont les résultats de la CEI qu’elle a certifiés.
D’autre part, ce n’est pas seulement la France qui avait reconnu les résultats proclamés par la CEI, mais bien la quasi-totalité de la communauté internationale (La CEDEAO, l’Union Africaine, la Francophonie, les Nations Unis, l ‘Union Européenne, les Etats-Unis, le Canada,…etc…etc…). On ne peut pas accuser toutes ces nations et organisations internationales d’avoir eu un parti pris contre le président Gbagbo.
Les relations entre le président Gbagbo et la droite française étaient certes mauvaises, mais la crise postélectorale n’aurait pas eu lieu s’il avait dès le départ reconnu sa défaite. Notons que le même président du Conseil Constitutionnel qui avait proclamé le président Gbagbo « vainqueur », est venu proclamer de nouveaux des résultats conformes cette fois aux procès-verbaux du vote, lors de la prestation de serment du nouveau président.
En tant qu’intermédiaire entre les présidents africains et la France, M. Bourgi savait ce qu’il gagnait dans cette affaire. Il a lié une amitié avec le président Gbagbo, qu’on dit être très généreux. Il vivait cet argent. C’est normal qu’il se sente coupable à la chute de ce dernier, puisque l’argent décaissé par le président Gbagbo n’a pas eu l’effet escompté. Mais qu’il ne tente pas de refaire l’histoire parce qu’il veut vendre un livre.
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