Le 16 décembre 2021, le Premier ministre ivoirien Patrick Achi a présidé la reprise du dialogue entre pouvoir et opposition en Côte d’Ivoire. Jules Brou, l’un des fidèles partisans de Guillaume Soro, se prononce sur ce dialogue politique diversement interprété.
• L’année 2021 tirant à sa fin, quelle lecture faites-vous de la situation sociopolitique
de la Côte d’Ivoire ?
Jules Brou : L’histoire de la Côte d’Ivoire continue à rimer avec des bégaiements sociopolitiques sous un régime qui déplace les problèmes plutôt que de chercher à les solutionner durablement. Il faut le dire clairement, un an de perdu sur 22 ans de turbulences. Nous sommes encore loin de sortir du tunnel liberticide dans lequel l’actuel gouvernement maintient les ivoiriens qui sont toujours en attente de l‘été indien.
Taux de Chômage de plus en plus en hausse, une flambée d’injustices dans tous les secteurs d’activités, déstructuration du secteur de l’immobilier, insécurité, cherté de la vie, destructions de logements et déguerpissement des ménages pauvres en pleine année scolaire, déchirure du tissu social et approfondissement du déficit de confiance entre le peuple et les gouvernants, exacerbation de la dépravation des mœurs, état généraux de l’éducation entre doute, hésitation et indécision gouvernementale, impartialité dans le traitement des détenus d’opinion et des exilés politiques, départ anticipé en congé…..Evidemment, un tableau obscur avec lequel le gouvernement se dirige vers le nouvel an 2022. Dans cette situation de déséquilibres profonds et de stabilité notoirement illusoire, peut-on parler d’une Côte d’Ivoire réconciliée avec elle-même ?
• Toujours est-il que le Gouvernement du Premier Ministre Patrick Achi initie des consultations avec différentes tendances de la classe politique ivoirienne. N’est-ce pas prometteur en termes de renforcement de la réconciliation ?
Jules Brou : Par voie de presse nous apprenons que le Premier Ministre ivoirien Patrick Achi a appelé, jeudi 16 décembre 2021 à Abidjan, l’opposition ivoirienne à maintenir, selon lui, le climat social apaisé qui règne actuellement en Côte d’Ivoire, un pays marqué par les violences électorales de la présidentielle d’octobre 2020 ayant fait des dizaines de morts, des centaines de blessés et des milliers de biens détruits. De fait, il s’agit d’un appel à la reprise du dialogue entre le pouvoir et l’opposition.
Certes, ces consultations initiées par le gouvernement sont nobles. Par contre, nous nous posons la question de savoir s’il s’agit effectivement de la Côte d’Ivoire quand Patrick Achi affirme que «Le contexte actuel a fondamentalement changé, les temps de crise sont passés ». L’actuel Premier Ministre ivoirien est un produit politique de l’houphouetisme qui ne doit pas perdre de vue que l’exclusion est le principal germe qui gangrène la situation sociopolitique d’un pays.
On se rappelle que le vendredi 12 novembre 2021, le Chef du gouvernement ivoirien avait tenu une rencontre avec une trentaine de jeunes qui selon ses propres termes » incarnent cette Côte d’Ivoire nouvelle au cœur du projet de société du Président de la république ‘‘. Tous nous avons noté que le contexte dans lequel cette rencontre eut lieu a provoqué une vague d’indignation révélatrice de la mauvaise gestion des affaires de l’Etat. Pour nous, Patrick Achi est vu comme un houphouetiste qui s’écarte des valeurs cardinales de tolérance, d’inclusion, de rassemblement, de paix et d’union chères au fondateur du PDCI-RDCI, Houphouët-Boigny. Pour l’heure, ce qui est appelé dialogue entre le pouvoir et l’opposition n’est rien d’autre qu’un embellissement politique qui cache l’exclusion pratiquée contre des citoyens ivoiriens.
Notamment, Guillaume Soro et Charles Blé Goudé respectivement présidents du GPS et du COJEP, deux leaders politiques contraints à l’exil. C’est une forme de discrimination politique aux conséquences nuisibles à la Côte d’Ivoire.
Il s’entend que le véritable dialogue affichera tout son sens quand les tenants actuels du pouvoir poseront des actes concrets, dépoussiérés de marginalisation, qui favorisent une décrispation sociale qui passe par le retour de tous les exilés politiques et par la libération des prisonniers politiques. Nous espérons qu’avant 2022, notre appel républicain et pacifique sera entendu par ceux qui détiennent circonstanciellement les leviers du pouvoir.
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