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Côte d’Ivoire : Retour de Guillaume Soro, lancien premier ministre maintien le suspens, « Tâchons d’être en vie »

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Soupçonné d’avoir fomenté une « insurrection » fin 2019, l’ex-allié d’Alassane Ouattara est toujours sous le coup d’une condamnation à la prison à vie pour « atteinte à la sûreté de l’Etat ».

L’ancien premier ministre d’Alassane Ouattara, puis président de l’Assemblée nationale en conférence de presse à Paris, le 17 septembre 2020.
Guillaume Soro reviendra-t-il prochainement en Côte d’Ivoire, cinq ans après son départ ? Début avril, tous les signaux semblaient au vert. On apprenait que le président Alassane Ouattara et l’ancien premier ministre, sous le coup d’une condamnation à la prison à perpétuité par la justice ivoirienne pour « atteinte à la sûreté de l’Etat », s’étaient passé deux coups de fil à la fin du mois de mars, des échanges « marqués par la cordialité », selon un message posté par Guillaume Soro sur X. « La prochaine fois, ça sera en Côte d’Ivoire, avait-il alors promis. L’élection présidentielle de 2025 n’est plus loin. »

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Depuis, les deux hommes ne se sont plus parlé de vive voix, le ton des déclarations de Guillaume Soro s’est sensiblement durci et les rangs du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP, le parti au pouvoir) semblent divisés sur le cas de l’ancien chef rebelle, dont le ralliement fut primordial dans la victoire d’Alassane Ouattara sur Laurent Gbagbo en 2011.

« Il n’y a eu que deux coups de fil dans le contexte particulier de la grâce accordée à ses camarades, relativise un cadre du pouvoir, mais c’en est resté là. 

» Guillaume Soro voulait en effet remercier le chef de l’Etat d’avoir accordé le 22 février la grâce à 51 prisonniers, condamnés pour des infractions commises lors des crises post-électorales ou pour « atteinte à la sûreté de l’Etat ». « Guillaume [Soro] a estimé bon de faire savoir à l’opinion publique qu’ils s’étaient entretenus, poursuit notre source. Mais notez qu’il n’y a pas eu de réaction ni de la présidence, ni du parti. »

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« Preuve de sincérité »
Le 23 avril, Guillaume Soro s’est donc fendu d’un nouveau message sur le réseau social X assorti d’un selfie, sourire en coin et lunettes de soleil sur le nez. Dénonçant « des préalables, toujours », du RHDP et ironisant sur les prérequis qu’exigerait de lui le pouvoir.

« Il faut que Soro déclare son retour au RHDP d’abord, il faut qu’il fasse la preuve de sa sincérité, il faut le châtier, il serait malavisé de lui faire confiance, etc. » Des propos tenus sur les réseaux sociaux par des internautes favorables au RHDP ces dernières semaines, mais pas par l’exécutif, qui a conservé un silence prudent.

Il a fallu attendre le 25 avril pour que le secrétaire exécutif du RHDP, Ibrahima Cissé Bacongo, s’exprime sur le sujet en conférence de presse. Revenant sur ces échanges téléphoniques, M. Bacongo a salué « une bonne démarche qui va dans le sens de la réconciliation nationale », et a « encouragé » Guillaume Soro à « consolider ce premier pas par des actes concrets ». Le secrétaire exécutif du parti a également nié la « rumeur » selon laquelle le retour de l’opposant serait conditionné à adhésion au RHDP.

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Une déclaration en forme de main tendue saluée par les proches de Guillaume Soro, comme Mamadou Traoré, un cadre du parti Générations et peuples solidaires (GPS), qui a jugé sur Facebook que « [Ibrahima Cissé] Bacongo a été très courtois et élégant dans le traitement de ce sujet ».

En réaction, a-t-il annoncé, Guillaume Soro a « décidé d’envoyer une délégation de son mouvement politique vers lui [Ibrahima Cissé Bacongo] afin d’engager avec son parti politique un dialogue constructif dans l’intérêt de la nation ».
Mais d’autres cadres du pouvoir semblent moins bien disposés à l’égard de l’ancien chef rebelle. Le ministre Mamadou Touré, porte-parole adjoint du gouvernement, a ainsi appelé le 12 avril les militants à rester « très vigilants ».

Le 25 avril, M. Touré s’est également exprimé à la suite d’Ibrahima Cissé Bacongo, avec moins d’aménité que son collègue. « Si Guillaume Soro le souhaite, qu’il revienne dans son pays ! s’est-il exclamé. Mais on a plutôt l’impression qu’il veut rentrer sans rentrer », voire qu’il « espère recueillir du RHDP des marques d’hostilité ». Un proche d’Alassane Ouattara va même plus loin, estimant que « le chef d’Etat s’est lassé des revirements » de M. Soro et que sa seule destination envisageable s’il remet les pieds à Abidjan sera la prison.
« Tâchons d’être en vie »

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Au sein de la majorité au pouvoir, l’hostilité envers cette personnalité si particulière, passée par tous les camps politiques du pays, repose sur des raisons diverses. Certains par manque de confiance, après que l’ex-président de l’Assemblée nationale a été accusé d’avoir fomenté une « insurrection civile et militaire » visant à renverser le président Ouattara en décembre 2019. D’autres par calcul politique. Les plus ambitieux ne souhaitent ne pas voir s’allonger la liste des prétendants à la magistrature suprême.

« Si Guillaume [Soro] rentre, je le rejoins, promet un député RHDP sous couvert d’anonymat. Je ne suis pas le seul. Il a gardé de nombreux soutiens, mais nous restons à couvert, car nous savons ce que nous infligera le régime si nous le disons publiquement. » Les pro-Soro gardent en mémoire la rentrée politique de juillet 2017.

Après des déclarations acerbes contre le régime, tous les hauts fonctionnaires ayant assisté à la réunion de l’Union des soroïstes avaient été immédiatement licenciés. Parmi eux, le secrétaire national à la bonne gouvernance, Sindou Méité, et le directeur général de la Loterie nationale (Lonaci) Issiaka Fofana. Selon notre source, les opérateurs privés connus pour leur proximité avec M. Soro s’étaient également vu retirer leurs marchés d’Etat.

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« Alassane [Ouattara] voit en Guillaume [Soro] une menace réelle sur son propre terrain, poursuit le député. Il est resté très populaire dans le nord [son fief électoral] et, grâce à son exil, il n’est pas comptable du bilan d’endettement et de casse sociale du gouvernement. » Aussi le président Ouattara, dont l’éventualité d’une candidature à un quatrième mandat se précise, gagnerait-il selon lui à favoriser le retour de Guillaume Soro pour « rassurer l’électorat du nord » du pays.

« Tous deux marchent sur des œufs, car chacun a à la fois peur et besoin de l’autre, poursuit notre interlocuteur. La hantise d’Alassane Ouattara est que Guillaume Soro fasse alliance avec Laurent Gbagbo ou Tidjane Thiam », le nouveau président du PDCI, alors que l’intéressé avait appelé en novembre 2020, après l’élection, les forces de défense et de sécurité à faire barrage à un troisième mandat du président Ouattara.

Toutes ces spéculations interviennent dans un contexte où l’état de santé de Guillaume Soro est de plus en plus évoqué en Côte d’Ivoire. L’ancien premier ministre est apparu amaigri lors de son voyage au Niger en novembre 2023. Depuis le début de l’année, on le dit voyageant sur tout le continent pour se faire soigner. « Quand viendra l’heure de la décrispation vraie, je serai au rendez-vous, annonçait-il sur X le 23 avril. Pour l’heure, tâchons d’être en vie. 

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