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Sénégal : Ousmane Sonko, itinéraire sinueux du nouveau PM et père du « Projet »

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Le maire de Ziguinchor (sud) a été nommé mardi soir Premier ministre du Sénégal par le nouveau président, Bassirou Diomaye Faye.

Après huit ans de farouche opposition au régime de Macky Sall, Ousmane Sonko a réussi à porter les Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef) au pouvoir. Le choix qu’il a porté sur Bassirou Diomaye Faye, comme candidat de substitution de ce parti politique créé en 2014 par des cadres de l’administration sénégalaise, a porté ses fruits le 24 mars dernier à la suite de l’élection au premier tour de M. Faye comme cinquième président de la République.

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Dépeint comme le père du Projet « pour un Sénégal souverain, juste et prospère dans une Afrique en progrès », le nouveau Premier ministre sénégalais, âgé de 49 ans, a réussi à asseoir ses idées de manière fulgurante au prix d’épreuves jonchées sur son chemin au cours des huit dernières années. Sa révocation de la fonction publique, en août 2016, pour manquement à l’obligation de discrétion professionnelle, a donné comme un coup d’accélérateur à sa carrière politique puisque l’ex-inspecteur des impôts et des domaines sera élu un an plus tard député à l’Assemblée nationale.

Il bâtira sa politique sur les révélations de « malversations » sur certains marchés de l’Etat. Les scandales soulevés autour du foncier, des exonérations fiscales abusives et des ressources naturelles telles que les hydrocarbures, entre autres, feront sa publicité. Les deux livres qu’il publie en 2018, « Pétrole et gaz au Sénégal : Chronique d’une spoliation » et « Solutions », convaincront une grande partie de l’opinion qui épouse définitivement ses propositions pour régler les problèmes sociaux et économiques du Sénégal.

Bourreau du « système »

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Dans ces ouvrages, il théorise la notion de « système » qui constitue en effet, pour lui, une convergence d’intérêts fondée sur une infime minorité de la société sénégalaise (hommes politiques, fonctionnaires, hommes de médias, lobby maraboutique…) qui fait main basse des ressources de l’Etat. Le discours est apprivoisé par un grand nombre de jeunes dans une population où le taux de chômage est assez élevé. Ousmane Sonko se présente à l’élection présidentielle en 2019 et récolte 687.000 voix, soit 15,76% des suffrages, un score qui le place dès lors comme un redoutable opposant du régime du président Macky Sall.

Deux ans plus tard, l’affaire Adji Sarr surgit dans l’espace public. L’opposant est accusé par cette jeune employée d’un salon de massage dakarois de viols répétitifs et menaces de mort. Une plainte est déposée contre lui à la gendarmerie et sa garde à vue, intervenue quelques mois plus tard, déclenche une série de manifestations violentes à travers le pays. Ses partisans crient au « complot » d’Etat pour éliminer leur candidat de la course à l’élection présidentielle de 2024.

Sonko ne perd pas pour autant ses droits civiques puisqu’il se porte candidat aux élections municipales de janvier 2022 sous la bannière de la coalition Yewwi Askan Wi (YAW, libérer le peuple). Il devient sans surprise maire de Ziguinchor et parvient, à travers la campagne nationale qu’il a menée, à influencer le vote de plusieurs personnes pour d’autres candidats de la coalition YAW, qui rafle dans la foulée plusieurs grandes villes du pays dont la capitale Dakar. Il reproduit le même procédé aux élections législatives, tenues six mois après, et parvient avec les députés du Parti démocratique sénégalais (PDS) à décrocher presque la moitié des 165 sièges du parlement.

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Flair politique

Arrêté et emprisonné fin juillet 2023 en application de sa condamnation à deux ans ferme pour « corruption de la jeunesse » contre Adji Sarr, un jugement prononcé un mois auparavant par une chambre criminelle spéciale du tribunal de Dakar, Ousmane Sonko voit les dossiers pouvant handicaper sa candidature à la présidentielle de 2024 se corser sur son dos. Outre les affaires liées aux manifestations politiques qui ont occasionné environ 80 morts entre 2021 et 2024, c’est sa condamnation pour diffamation qui poussera le Conseil constitutionnel à invalider son dossier de candidature, à la suite d’une longue bataille judiciaire.

En revanche, Ousmane Sonko eut le flair politique de désigner le secrétaire général du Pastef, Bassirou Diomaye Faye, âgé de 44 ans et inspecteur des impôts et domaines comme lui, pour représenter le parti au scrutin présidentiel alors qu’ils étaient tous les deux détenus en prison. Arrêté onze mois plus tôt pour un post Facebook perçu comme un outrage à magistrat, M. Faye n’a pas été jugé pour le chef d’inculpation, son casier judiciaire restant du coup vierge.

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Malgré une interruption de plus d’un mois du processus électoral, Ousmane Sonko sort de prison avec son candidat, en faveur d’une loi d’amnistie votée le 6 mars dernier, et sillonne le pays pour mener une campagne qui durera moins de dix jours. Face à des publics acquis sur leur chemin, il réussit à imposer Bassirou Diomaye Faye, moins charismatique que lui, mais « plus structuré », qui sera élu au premier tour du 24 mars 2024 avec un taux de 54,28% face au candidat du pouvoir Amadou Ba (35,79%) et les dix-sept autres candidats restants qui se sont partagés des miettes.

« Lourde responsabilité »

Ousmane Sonko réussit ainsi à mener le projet Pastef à bon port. Et c’était sans surprise, d’après plusieurs observateurs, lorsque le président Bassirou D. Faye l’a nommé mardi 2 avril, quelques heures après sa prise de fonction, Premier ministre du nouveau gouvernement dont la liste devrait être disponible ce mercredi.

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A la prestation de serment suivie de l’installation du président Faye mardi à Diamniadio, une ville située à une trentaine de kilomètres de Dakar, le maire de Ziguinchor est apparu sobrement vêtu derrière le nouveau chef de l’Etat alors qu’il était l’attraction pour beaucoup de personnes qui s’étaient déplacées pour la cérémonie.

Sur la télévision nationale RTS, Ousmane Sonko déclare prendre cette nomination comme un sacerdoce, rappelant la promesse qu’il avait effectuée lors du dernier meeting de campagne de la coalition Diomaye Président au département de Mbour. Il avait indiqué dans un stade comble, qu’après avoir réussi à faire élire le candidat Diomaye Faye, « il ne sera pas question de le laisser seul assumer cette lourde responsabilité » de chef de l’Etat.

« Nous articulons notre action autour de la citoyenneté et la responsabilité collective comme le démontre cette formidable jeunesse sénégalaise à travers les actions de nettoiement des artères des différentes villes du Sénégal » constatées ces derniers jours, souligne le chef du gouvernement sénégalais.

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« Nous ne ménagerons aucun effort pour atteindre les objectifs promis au peuple sénégalais, c’est-à-dire la rupture, le progrès et le changement définitif dans le bon sens », promet le président Pastef, un parti qui continue d’inspirer plusieurs militants souverainistes à travers le continent africain.

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